Sommaire :
- J’ai décidé d’écrire une lettre ouverte au maire
- Le maire engage mollement une phase de « concertation » peu convaincante
- Le maire prend position contre la réforme
- Le maire prétend que le coût de la réforme est élevé sans chercher à l’évaluer !
- La mairie n’aurait pas les locaux nécessaires…
- La tentation de désobéir
- La vérité est que la réussite de cette réforme ne dépend que de la bonne volonté des collectivités : construire l’avenir de nos enfants n’est-il pas un chantier exaltant et mobilisateur ?
Télécharger la lettre de Jean-François Papot à Philippe Pemezec, maire du Plessis-Robinson(novembre 2013)
J’ai décidé d’écrire une lettre ouverte au maire
J’ai analysé avec attention les propositions que la municipalité a pu faire lors des derniers conseils d’école ou lors de réunions d’information tout au long de la « concertation » sur la réforme des rythmes scolaires. J’ai décidé d’envoyer une lettre ouverte au maire pour alerter la municipalité et les Robinsonnais sur le risque actuellement pris par la ville si elle ne s’engage pas dès maintenant dans une véritable mise en place de la réforme.
Le maire engage mollement une phase de « concertation » peu convaincante
Différents aspects de cette phase de « concertation » illustrent le problème actuel :
- La mairie a reporté en 2013 la mise en œuvre des rythmes scolaires d’un an ;
- Le maire n’a laissé que deux semaines aux parents en mars 2013 pour répondre à son questionnaire conduisant ainsi à un faible taux de participation (20%) ;
- La communication du maire insiste sur le fait que 48% des parents s’étaient prononcés pour les rythmes actuels, en négligeant que cela implique que 52% soutenaient la réforme ;
- Les collaborateurs du maire ont montré en octobre des présentations identiques à celles de mai indiquant ainsi le peu d’évolution du dossier en 5 mois ;
- Dépassés par les évènements, vos collaborateurs ont construit un vote à la va-vite lors de la réunion du 11 octobre sans base démocratique.
J’ai longtemps voulu croire que, malgré des réticences sur le bien-fondé de cette réforme, le maire placerait l’intérêt de l’enfant au-dessus de tout et ferait son possible pour que la mise en œuvre de cette réforme soit un succès pour notre ville et les petits Robinsonnais.
Constatant un flottement dans le processus en octobre, la section du Parti Socialiste a même demandé via son site internet de prendre lui-même le dossier en main plutôt que de le confier à des collaborateurs qui n’ont par définition ni ses pouvoirs, ni son influence.
Le maire prend position contre la réforme
Le 14 novembre, alors même que certains conseils d’école dont le maire avait demandé l’avis ne s’étaient pas encore déroulés, il prend position sur son blog affichant tout à la fois le rejet de la réforme (ou plus exactement une demande de son report sine die) et une proposition qu’il veut transmettre au rectorat.
Le maire se prononce donc publiquement contre cette réforme en prétendant qu’ « il est prouvé et reconnu qu’elle ne va pas dans l’intérêt de l’enfant tout en ayant un coût très important pour les collectivités territoriales ». Il évoque également l’absence de concertation avec les enseignants mais c’est oublier un peu vite la longue consultation de 18 mois organisée en 2011 par M. Chatel, alors ministre de l’Éducation nationale. Le rapport d’orientation sur les rythmes scolaires qui en est résulté montrait que la « quasi-unanimité » des participants estimaient que la « densité de la journée d’école a été fortement accentuée par la suppression d’une demi-journée de classe dans la semaine ». Il est vrai que ce rapport n’avait débouché sur rien de concret de la part du gouvernement précédent…
Les experts de toute sorte mais aussi les parents, dont je fais partie, savent mieux que quiconque que leurs enfants apprennent mieux le matin. Nombre d’entre eux ont rêvé d’une éducation à l’allemande avec des cours le matin et des activités périscolaires l’après midi. Bien sûr, la réforme a parfois eu des ratés et tout bouleversement des habitudes conduit à son lot de problèmes d’adaptation.
Force est néanmoins de constater que, selon les enquêtes, entre 83% [1] et 93 % [2]des collectivités ayant mis en œuvre cette réforme en sont satisfaites, très loin de la situation désastreuse que le maire évoque.
Le maire prétend que le coût de la réforme est élevé sans chercher à l’évaluer
En utilisant les mêmes éléments de langage que ses collaborateurs lors des conseils d’école, le maire aborde ensuite le coût de la réforme mais le traduit automatiquement en augmentation d’impôts. Je suis en premier lieu ravi de constater que la commune intègre maintenant les futurs coûts de fonctionnement comme facteur de ses choix budgétaires. Si elle avait pris ce tournant rigoriste quelques années plus tôt, nous nous serions contentés d’un pôle culturel certes moins grandiose mais sans doute plus adapté à notre commune. En effet, aux 40 M€ d’investissements initiaux pour le Pôle culturel, dont au moins 15 seront à la charge de la ville dans les prochaines années, il faudra ajouter les frais de fonctionnement qui pourraient représenter jusqu’à 10% du coût des travaux, soit 3 M€ par an. Je n’évoque pas les équivalents en impôts des différents autres projets phare comme la mise en place de la vidéosurveillance ou le PPP-voirie.
Tout au long de cette « concertation », les parents ont demandé aux services municipaux une évaluation du coût de cette réforme pour notre ville. Ils ont toujours, jusqu’aux derniers conseils d’école, refusé d’évoquer des chiffres au prétexte que les associations ne pouvaient rien proposer faute d’enveloppe horaire.
Comme la mairie attendait une « décision » unanime de parents qui eux-mêmes souhaitaient se prononcer sur la base des contraintes et propositions des associations, on comprend aisément la gêne des services municipaux face à ce serpent qui se mord la queue.
À défaut d’évaluation précise du coût pour notre commune, le maire avance maintenant des chiffres (350 € ; 450 € …) peu crédibles tant ils sont trop éloignés des données disponibles :
Je retiens donc l’évaluation de l’Association des maires de France, soit 150€ par enfant et par an. Le budget consacré à la réforme des rythmes scolaires représente donc pour la ville du Plessis-Robinson 480 000 € par an, soit 17,10 € par habitant (sans en déduire les aides de l’état et de la CAF) qui peuvent être engagés en trouvant des économies sur d’autres budgets sans qu’il soit nécessaire de sortir l’épouvantail des impôts à moins que… cela ne soit qu’un moyen bien facile d’annoncer une hausse que le maire sait inévitable indépendamment de cette réforme ?
À l’aune des choix et investissements réalisés ces dernières années, la réforme des rythmes scolaires aura donc un coût marginal pour une ville comme le Plessis-Robinson. Ce coût sera d’autant plus marginal que les aides offertes ne sont pas négligeables : aux 50 € par enfant apportés par l’État la première année, s’ajoute l’aide de la CAF dont le maire ne fait pas mention et qui représente quand même 54 € par enfant [3] et par an de manière pérenne, soit le tiers des coûts estimés.
La mairie n’aurait pas les locaux nécessaires…
Les collaborateurs du maire opposent ensuite lors des conseils d’école un autre argument contre cette réforme : l’absence de locaux pour accueillir les enfants. L’un d’eux s’indignait à l’idée de « construire des équipements pour une heure par jour ». Je ne reviens pas sur la vacuité d’un tel argument : combien de temps les restaurants scolaires sont-ils utilisés sans que personne songe à ne pas en construire ? Combien d’heures par an la nouvelle salle de spectacle sera-t-elle utilisée ?
Je me bornerai à constater que de nombreuses opportunités existent comme les centres de loisirs (qui accueillent déjà plus du tiers de nos enfants), les salles de restauration de nos écoles (même si cela suppose bien évidemment de les nettoyer après utilisation), les préaux, les gymnases et autres salles de sport, les salles de la ville comme l’Orangerie, le Moulin Fidel, et même certaines salles de la mairie, la piscine ou la Maison de la Musique et de la Danse, les stades de la ville, les parcs départementaux et même les cours des écoles lorsque le temps le permet…
L’utilisation de ces équipements pourrait encore être optimisée en panachant les horaires en fonction des classes ou des écoles… Il n’est donc nul besoin de construire de nouveaux équipements pour cette réforme ou de menacer les enseignants du chaos de classes dévastées par le passage d’enfants hors de leur présence (mais pour rappel, néanmoins surveillées par un adulte). Tout au plus devrons-nous louer en 2014-2015 des locaux préfabriqués pour attendre la mise à disposition du pôle culturel qui trouvera là une justification inespérée à son existence.
La tentation de désobéir
Même si P. Pemezec se fait l’écho des 50 maires qui menacent de désobéir à la loi en 2014, je ne peux envisager que nous soyons délinquants à la rentrée prochaine. Quelle triste image ces élus donnent-ils en choisissant les lois qui les arrangent et refusant les autres ? Puisque nous parlons d’école, qui imaginerait que les écoliers et leurs parents puissent faire de même ?
Je suis de ceux qui pensent que l’éducation des petits Robinsonnais est une priorité absolue. Qu’importent les querelles politiciennes, je n’ai pas choisi de m’engager en politique pour de médiocres débats qui renvoient toujours aux autres la responsabilité des difficultés : l’État qui n’assumerait pas ses charges, les enseignants qui feraient mal leur travail, les parents qui n’arriveraient pas à s’entendre…
La vérité est que la réussite de cette réforme ne dépend que de la bonne volonté des collectivités : construire l’avenir de nos enfants n’est-il pas un chantier exaltant et mobilisateur ?
Le maire sortant a la responsabilité d’organiser aujourd’hui, à partir des horaires proposés par les conseils d’école, les activités qui seront offertes en septembre 2014, mais aussi de rassurer les parents sur la qualité de ces activités et sur la manière dont seront gérés les sorties, les passages de relais, la formation des animateurs…
Je demande au maire d’impulser la volonté politique positive qui a tant manqué à ce dossier au Plessis-Robinson et de mobiliser, s’il en est besoin, les agents municipaux, les animateurs, les associations dans le seul but de réussir la mise en œuvre de cette réforme.
La capacité doit être donnée aux parents d’élèves de se réunir collectivement non pas pour écouter une bonne parole, qu’elle vienne du maire, de moi ou d’un autre, mais juste pour leur permettre d’exprimer les prémices de ce qui sera notre futur plan d’éducation territorial.
Une fois cette bonne volonté retrouvée, les difficultés soulevées par le maire seront sinon réglées, au moins en bonne voie de l’être et je sais que l’ensemble des parties prenantes sauront collectivement trouver les réponses à ce qui semble aujourd’hui insurmontable au maire.